A méditer

Extrait d’un article de Nipun Mehta, publié le 7 juillet 2015
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J’ai fait récemment la connaissance de Dada Vaswani, un saint de 97 ans. Il a de nombreux adeptes dans le monde, est hautement respecté par des moines et des religieuses de toutes sortes de traditions et il rayonne d’un intense sentiment de paix. J’étais profondément reconnaissant de le rencontrer mais ses premiers mots furent : « Je suis si reconnaissant de faire votre connaissance. » Ce n’était pas pour plaisanter, il était sincère et ce n’était pas qu’il pensait que j’étais quelqu’un d’unique, pour lui chacun d’entre nous est unique car nous sommes tous reliés au tout et l’ensemble est sacré …
Dada me raconta que quelqu’un avait demandé à son guru un jour s’il était un poète, un enseignant,  un saint.  Celui-ci lui répondit : « Je suis un zéro. »  Il fit une pause et ajouta : «Je ne suis pas un zéro anglais … le zéro anglais prend de la place, je suis le Sindhi ‘Nutka’. En Sindhi, le zéro est écrit comme un point.  C’est cet idéal qui me fut présenté, »,ajouta Dada.

Lorsqu’on arrive à réduire radicalement le « moi » nous trouvons l’expansion véritable. C’est quand notre préoccupation avec le moi diminue que les énergies supérieures peuvent couler à travers nous. Nous ne cherchons plus à changer les choses dans le monde mais plutôt à être ce changement même que nous désirons voir. La prière de St François n’était pas `fais de moi le directeur général de Ta paix’ mais ‘fais de moi un instrument de Ta paix’. Et être un instrument cela veut dire comprendre le véritable pouvoir d’être un zéro.
Afin de sonder cette idée d‘être un instrument, d’être zéro,  je le questionnai au sujet des Bodhisattvas. De même que les Jainas dans le Jainisme, les bouddhistes conçoivent les Bodhisattvas en tant qu’êtres qui ont sacrifié leur propre libération au profit des autres. It réfléchit un moment et, ses yeux dans les miens, récita un poème de Shantideva, délibérément, mot après mot :
Puissé-je être le protecteur des abandonnés,
Le guide de ceux qui cheminent.
Et pour ceux qui aspirent à l'autre rive,
Etre une barque, un pont, un gué.
Puissé-je être lampe dans les ténèbres,
Une couche pour ceux qui veulent prendre du repos,
Puissé-je être pour tous les êtres celui qui calme la douleur,
Un vase d’abondance inépuisable, l’arbre qui réalise tous les souhaits.
Puissé-je apporter la nourriture et l’éveil aux multitudes d’êtres humains qui occupent l'espace,
aussi longtemps que tous ne seront pas délivrés de la souffrance et que tous ne soient devenus des êtres éveillés !

Sa voix sombra dans le silence et aucune parole ne pourrait décrire l’énergie qui régnait dans la pièce à ce moment-là.  Mon cœur débordait de reconnaissance. Avec toute l’humilité dont j’étais capable,  je lui demandai, « Dada, comment puis-je vous servir ? » Alors il fit  quelque chose de stupéfiant. Il mit ses mains en coupe devant moi, comme s’il tenait un bol de mendiant, et me dit avec douceur, « je vous demande vos larmes de compassion. »

Une longue pause suivit. Aucune question, aucune réponse ne se présentait. Nous nous regardions dans les yeux. Finalement, j’arrivai à dire : « je ferai de mon mieux, Dada. »

Quand Dada demandait mes larmes de compassion, il alludait au  pouvoir de zéro – cette capacité d’être un récipient vide afin que le torrent de la compassion puisse passer sans effort à travers vous. Et cela commence avec la sagesse de l’humilité.